#A son image Jérôme Ferrari Actes sud
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A son image - Jérôme Ferrari
Chronique du livre de Jérôme Ferrari "A son image" de la littérature française contemporaine pour la rentrée littéraire 2018.
Antonia est photographe de mariage depuis qu’elle s’est mise à son compte. Lorsque s’ouvre le roman, elle finit de photographier un énième couple sur un port en Corse. En fin de journée, elle rencontre son ancien ami croate, Dragan, engagé maintenant dans la légion. Il passe une douce soirée ensemble…Puis, la nuit se termine. Elle revient chez elle. Mais, en rentrant, elle est victime d’un…
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Jérôme Ferrari Des mots sensés face à l’insensé
Même si cette chronique, quasi quotidienne, aborde le domaine des livres, je n’imaginais pas parler d’un écrivain et encore moins de Jérôme Ferrari. Jusqu’à ce que je lise un entretien que l’écrivain a donné au site Mediapart, le 3 Mai dernier.
Étant souvent avare de compliments, dans mes articles, profitons de l’exception. J’y ai trouvé un propos lumineux. Jérôme Ferrari parle de politique, ou plus exactement de la Politique. Il aborde également ce qu’il appelle la « servilité affligeante » de certains médias.
Politique et médias, un couple infernal qui, plus que d’autres acteurs de la société véhicule la parole. Et c’est justement cette parole qui est mise à mal, galvaudée, pillée, vidée de tout sens, débraillée (”Casse toi pov’ c…”) jusqu’à une vulgarité devenue permanente (les chaines “tout info”).
Après coup (après lecture), il me parait « naturel » que ce soit un écrivain qui puisse dire cela. Non pas qu’il existe une « glorieuse indépendance d’esprit » de la profession d’écrivain, de tout temps des hommes de plume se sont compromis avec les Pouvoirs, souvent les plus abjects. Mais aujourd’hui, dans le brouhaha de la parole politico-médiatique, il me semble que la relative mise à l’écart des écrivains est une opportunité à saisir pour lire et entendre une parole plus libre.
De tout temps, les sociétés ont baigné dans la doxa. Ce serait un aveuglement que de dire et de croire qu’il a existé un âge d’or de la parole. En revanche, il me semble que la doxa est passée du stade majoritaire ou hégémonique, à un statut de parole unique. Nous parlons bien aujourd’hui, en économie, en politique et en culturel, de pensée unique. C’est dire.
Jérôme Ferrari dit bien, dans son entretien, que « nous ne vivons pas sous un régime totalitaire ». Mais en matière de parole quelque chose a changé. La « bonne parole », la doxa est passée de dominante à ultra dominante. C’est cette absence de dièses et de bémols qui change tout. Je trouve là une certaine logique politique. Quand on nous dit qu’en matière économique « il n’y a pas d’autre alternative » :
« Il n’y a pas d’autre alternative que celle d’aider Macron » (Manuel Valls 12 Mars 2020)
« Il n’y a pas d’alternative » à la ligne de Macron (vœux d’Alain Juppé, maire de Bordeaux, janvier 2019).
Passons rapidement sur la faute de sens -une « alternative » n’est pas une solution, mais le choix entre deux solutions- pour en arriver au sens lui-même. Que nous dit-on, de « gauche » à droite ? Je traduis trivialement : c’est comme ça et pas autrement. Dans ce cas, il n’y a plus de véritable débat. Les masques tombent.
© Norah Ferrari
Les mots de la politique
Les mots ont un sens, dit-on (disait-on) souvent. Il suffit donc de leur ôter tout sens pour introduire de la confusion dans les esprits et créer ce que j’appelle un nihilisme politique. Jérôme Ferrari trouve les termes justes : « on vide les mots de leur sens et on rend par là même impossible toute discussion, c'est-à-dire toute vie démocratique ».
Je crois qu’il ne faut pas se méprendre sur les paroles de J. Ferrari et sur le constat, que je partage, d’une parole galvaudée. Ce qui arrive n’est pas nouveau, ce que nous vivons est le point d’orgue de ce qui a précédé. Je n’ai pas choisi les deux citations, ci-dessus, par hasard (E. Valls et A. Juppé). Le gouvernement actuel n’est pas le Responsable unique de la situation actuelle. Il semble que, sous nous yeux, se déroule l’aboutissement d’un cycle initié au début des années 70. Le Pouvoir actuel est responsable (par définition), mais il n’est pas Le Responsable de la situation économique et sociale, sans parler du culturel. Il est le « finisseur ».
Le Pouvoir actuel fait la synthèse et J. Ferrari « synthétise la synthèse » avec talent : « Il y a donc des macronistes « de gauche », peu importe qu’ils défendent les thèses néolibérales ou les doctrines de maintien de l’ordre les plus extrêmes, il suffit qu’ils soient passés par le parti socialiste ».
Dans un article sur le site The Conversation, l’universitaire Olivier Costa abordait « Le difficile atterrissage municipal de LEREM » (19 Février 2020). Dans un commentaire, sous forme d’article je signalais que « LREM n’avait pas vocation à durer » et que « La République En Marche avait pour « mission » de décomplexer l’aile Libérale des partis politiques. Les réformes « macroniennes » semblent y parvenir. ». Pardon pour cette auto- citation, il s’agit simplement d’illustrer cette ambigüité du Pouvoir.
© Norah Ferrari
Les mots du médiatique
Les mots, il y a ceux qui les prononcent et ceux qui les répètent, sans aucune distanciation. Distanciation, une formule pourtant très à la mode par les temps qui courent.
J. Ferrari constate, dans son entretien, que « Au niveau médiatique, c’est encore pire, si c’est possible ». Constat en miroir au discrédit de la parole politique.
Son analyse est dure, mais me semble correspondre à la réalité : « L’absence candide de sens critique est franchement inquiétante, chez les éditorialistes, bien sûr, mais aussi chez les « journalistes politiques » qui ont la particularité , bien digne de notre époque d’antiphrases triomphantes, de ne jamais faire d’enquête journalistique et de parler de tout sauf de politique -à moins qu’on nomme politique, l’exégèse béate de la parole des gouvernants ».
Intéressé par ce propos en tant que citoyen et en tant que journaliste, j’ai joint Jérôme Ferrari. Je lui ai fait remarquer que je trouvais son propos des plus intéressants. D’une grande modestie, il a tenu à me dire que « ce n’était pas le cas de tous les journalistes, ni de toute la presse ». C’est vrai, mais c’est comme la nuance que je faisais, plus haut, entre la doxa éternelle et la doxa contemporaine. C’est une historie de dosage. Beaucoup c’est trop, mais trop c’est vraiment trop.
Du reste, dans son entretien à Mediapart, J. Ferrari estime que : « (…) appeler la presse un contre-pouvoir relève de l’aveuglement ou d’un humour douteux ».
Politique et médiatique ne sont pas les seuls piliers de cette interview. Le passage sur le détournement de la notion de « fake news » est jubilatoire. Vraiment je vous recommande chaudement de lire cet entretien. Que ce soit un écrivain et non un politique ou un médiatique qui le dise donne de la profondeur aux mots, il était temps.
Le juste poids des mots, le chic des photos
J’avais débuté cette série de chroniques en pensant offrir des images (photos) du moment que nous vivons. Les difficultés de déplacement et aussi mon talent limité en matière de photographie, ont rendu cette tâche difficile. Le texte s’est donc avéré indispensable.
Au cours de mes pérégrinations, j’ai soit essayé d’enrichir une photo par un texte, soit d’illustrer un propos par une photo.
Dans le cas de Jérôme Ferrari, l’élément déclencheur a été l’interview qu’il a accordée à Mediapart. L’écrivain étant confiné, en Corse, je lui ai demandé de me fournir une ou des photos de lui « dans le contexte ». Sa fille Norah a réalisé celles qui illustrent cette « chronique de la mort annoncée des mots ». Qu’ils soient tous deux remerciés, pour l’image, sans choc et pour les mots avec poids.
Hasard ou logique ? Jérôme Ferrari a écrit un roman qui aborde l’histoire d’une photographe « A son image» Acte Sud 2018. Dans un entretien vidéo sur le site Mediapart Live, l’écrivain estime que « La photographie est plus puissante que le cinéma». Laissons-le libre de ses propos. Mais une chose est sûre, ses mots ont encore un sens quand ils sont maniés avec talent et je crois, avec sincérit��.
Édité le 6 Mai 2020
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Corse Coronavirus: La ou les photos du jour
Même si cette chronique, quasi quotidienne, aborde le domaine des livres, je n’imaginais pas parler d’un écrivain et encore moins de Jérôme Ferrari. Jusqu’à ce que je lise un entretien que l’écrivain a donné au site Mediapart, le 3 Mai dernier.
Étant souvent avare de compliments, dans mes articles, profitons de l’exception. J’y ai trouvé un propos lumineux. Jérôme Ferrari parle de politique, ou plus exactement de la Politique. Il aborde également ce qu’il appelle la « servilité affligeante » de certains médias.
Politique et médias, un couple infernal qui, plus que d’autres acteurs de la société véhicule la parole. Et c’est justement cette parole qui est mise à mal, galvaudée, pillée, vidée de tout sens, débraillée (”Casse toi pov’ c...”) jusqu’à une vulgarité devenue permanente (les chaines “tout info”).
Après coup (après lecture), il me parait « naturel » que ce soit un écrivain qui puisse dire cela. Non pas qu’il existe une « glorieuse indépendance d’esprit » de la profession d’écrivain, de tout temps des hommes de plume se sont compromis avec les Pouvoirs, souvent les plus abjects. Mais aujourd’hui, dans le brouhaha de la parole politico-médiatique, il me semble que la relative mise à l’écart des écrivains est une opportunité à saisir pour lire et entendre une parole plus libre.
De tout temps, les sociétés ont baigné dans la doxa. Ce serait un aveuglement que de dire et de croire qu’il a existé un âge d’or de la parole. En revanche, il me semble que la doxa est passée du stade majoritaire ou hégémonique, à un statut de parole unique. Nous parlons bien aujourd’hui, en économie, en politique et en culturel, de pensée unique. C’est dire.
Jérôme Ferrari dit bien, dans son entretien, que « nous ne vivons pas sous un régime totalitaire ». Mais en matière de parole quelque chose a changé. La « bonne parole », la doxa est passée de dominante à ultra dominante. C’est cette absence de dièses et de bémols qui change tout. Je trouve là une certaine logique politique. Quand on nous dit qu’en matière économique « il n’y a pas d’autre alternative » :
« Il n’y a pas d’autre alternative que celle d’aider Macron » (Manuel Valls 12 Mars 2020)
« Il n’y a pas d’alternative » à la ligne de Macron (vœux d’Alain Juppé, maire de Bordeaux, janvier 2019).
Passons rapidement sur la faute de sens -une « alternative » n’est pas une solution, mais le choix entre deux solutions- pour en arriver au sens lui-même. Que nous dit-on, de « gauche » à droite ? Je traduis trivialement : c’est comme ça et pas autrement. Dans ce cas, il n’y a plus de véritable débat. Les masques tombent.
© Norah Ferrari
Les mots de la politique
Les mots ont un sens, dit-on (disait-on) souvent. Il suffit donc de leur ôter tout sens pour introduire de la confusion dans les esprits et créer ce que j’appelle un nihilisme politique. Jérôme Ferrari trouve les termes justes : « on vide les mots de leur sens et on rend par là même impossible toute discussion, c'est-à-dire toute vie démocratique ».
Je crois qu’il ne faut pas se méprendre sur les paroles de J. Ferrari et sur le constat, que je partage, d’une parole galvaudée. Ce qui arrive n’est pas nouveau, ce que nous vivons est le point d’orgue de ce qui a précédé. Je n’ai pas choisi les deux citations, ci-dessus, par hasard (E. Valls et A. Juppé). Le gouvernement actuel n’est pas le Responsable unique de la situation actuelle. Il semble que, sous nous yeux, se déroule l’aboutissement d’un cycle initié au début des années 70. Le Pouvoir actuel est responsable (par définition), mais il n’est pas Le Responsable de la situation économique et sociale, sans parler du culturel. Il est le « finisseur ».
Le Pouvoir actuel fait la synthèse et J. Ferrari « synthétise la synthèse » avec talent : « Il y a donc des macronistes « de gauche », peu importe qu’ils défendent les thèses néolibérales ou les doctrines de maintien de l’ordre les plus extrêmes, il suffit qu’ils soient passés par le parti socialiste ».
Dans un article sur le site The Conversation, l’universitaire Olivier Costa abordait « Le difficile atterrissage municipal de LEREM » (19 Février 2020). Dans un commentaire, sous forme d’article je signalais que « LREM n’avait pas vocation à durer » et que « La République En Marche avait pour « mission » de décomplexer l’aile Libérale des partis politiques. Les réformes « macroniennes » semblent y parvenir. ». Pardon pour cette auto- citation, il s’agit simplement d’illustrer cette ambigüité du Pouvoir.
© Norah Ferrari
Les mots du médiatique
Les mots, il y a ceux qui les prononcent et ceux qui les répètent, sans aucune distanciation. Distanciation, une formule pourtant très à la mode par les temps qui courent.
J. Ferrari constate, dans son entretien, que « Au niveau médiatique, c’est encore pire, si c’est possible ». Constat en miroir au discrédit de la parole politique.
Son analyse est dure, mais me semble correspondre à la réalité : « L’absence candide de sens critique est franchement inquiétante, chez les éditorialistes, bien sûr, mais aussi chez les « journalistes politiques » qui ont la particularité , bien digne de notre époque d’antiphrases triomphantes, de ne jamais faire d’enquête journalistique et de parler de tout sauf de politique -à moins qu’on nomme politique, l’exégèse béate de la parole des gouvernants ».
Intéressé par ce propos en tant que citoyen et en tant que journaliste, j’ai joint Jérôme Ferrari. Je lui ai fait remarquer que je trouvais son propos des plus intéressants. D’une grande modestie, il a tenu à me dire que « ce n’était pas le cas de tous les journalistes, ni de toute la presse ». C’est vrai, mais c’est comme la nuance que je faisais, plus haut, entre la doxa éternelle et la doxa contemporaine. C’est une historie de dosage. Beaucoup c’est trop, mais trop c’est vraiment trop.
Du reste, dans son entretien à Mediapart, J. Ferrari estime que : « (…) appeler la presse un contre-pouvoir relève de l’aveuglement ou d’un humour douteux ».
Politique et médiatique ne sont pas les seuls piliers de cette interview. Le passage sur le détournement de la notion de « fake news » est jubilatoire. Vraiment je vous recommande chaudement de lire cet entretien. Que ce soit un écrivain et non un politique ou un médiatique qui le dise donne de la profondeur aux mots, il était temps.
Le juste poids des mots, le chic des photos
J’avais débuté cette série de chroniques en pensant offrir des images (photos) du moment que nous vivons. Les difficultés de déplacement et aussi mon talent limité en matière de photographie, ont rendu cette tâche difficile. Le texte s’est donc avéré indispensable.
Au cours de mes pérégrinations, j’ai soit essayé d’enrichir une photo par un texte, soit d’illustrer un propos par une photo.
Dans le cas de Jérôme Ferrari, l’élément déclencheur a été l’interview qu’il a accordée à Mediapart. L’écrivain étant confiné, en Corse, je lui ai demandé de me fournir une ou des photos de lui « dans le contexte ». Sa fille Norah a réalisé celles qui illustrent cette « chronique de la mort annoncée des mots ». Qu’ils soient tous deux remerciés, pour l’image, sans choc et pour les mots avec poids.
Hasard ou logique ? Jérôme Ferrari a écrit un roman qui aborde l’histoire d’une photographe « A son image» Acte Sud 2018. Dans un entretien vidéo sur le site Mediapart Live, l’écrivain estime que « La photographie est plus puissante que le cinéma». Laissons-le libre de ses propos. Mais une chose est sûre, ses mots ont encore un sens quand ils sont maniés avec talent et je crois, avec sincérité.
Édité le 6 Mai 2020
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A son image de Jérôme Ferrari. Actes Sud 💛💛💛💛💛 " Elle est venue photographier la guerre, garder la trace de ce qui se passe ici....
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